mon histoire

Fin novembre 2015, je consulte mon médecin me sentant fatigué et ayant des douleurs au niveau de l'estomac, du bas ventre, du foie; bref cela ne va pas fort. Bilan sanguin, taux de PSA explosif, je comprends de suite qu'il y a un problème avec ma prostate. Échographie prostatique, le radiologue fait une drôle de tête, s'attarde sur la chaine ganglionnaire, le foie, les poumons ... on s'éloigne bien loin de la prostate, l'angoisse monte en moi, je sais déjà que le problème est plus important et mon esprit commence à ma susurrer le mot cancer.

Le radiologue est toujours muet, mais sa tête parle pour lui! Le langage non verbal quoi! Puis le verdict tombe. Monsieur, il faut prévoir un rendez-vous avec un urologue, un scanner et une scintigraphie. Chacun de ces mots résonne dans ma tête comme le glas, je sais très bien de quoi il parle, avantage ou désavantage de mon ancien métier.

Retour chez le généraliste. Lecture des résultats, elle empoigne son téléphone et en 10 minutes chrono obtient un rendez-vous urologue pour le jour même, scintigraphie pour le lendemain et deux jours plus tard le scanner. Le mot est prononcé, CANCER et en prime métastases sur la chaine ganglionnaire, le foie et surement  le squelette.

Un vertige me submerge, toute une carrière avec  40 jours de maladie, pour des broutilles, jamais hospitalisé, en fait jamais malade; et maintenant que pensais vivre tranquille ...... INJUSTE !

Après un moment de trouble, je mets les choses au point avec le médecin.  Je veux tout savoir, tout comprendre, pas de faux espoirs, rien que la vérité. Elle promet d'être honnête, et me donne là possibilité de la rencontrer chaque fois que le besoin se fera sentir, même sans rendez-vous. J'apprécie. Petite prescription de xanax au passage, au cas ou ....

Je cours chez l'urologue, un monsieur assez âgé au faciès rassurant. Moins rassurant quand il me dit vouloir procéder au très célèbre TR, pour les profanes, toucher rectal. Ce qu'il fait... sans grande délicatesse (c'est un homme! messieurs préférez une urologue c'est plus rare, mais le toucher doit être plus doux) Il me reste un jour de libre dans la semaine il en profite pour m'y placer une biopsie! sous anesthésie générale  vue ma réaction au TR il pense que cela va être compliqué; tu as raison mon gars!

Retour à la maison, là les émotions me submergent, je craque, tout se bouscule dans ma tête, La mort s'invite dans mes pensées, mon colocataire indélicat à commencé à travailler pour elle.

XANaX à l'aide! brouille mon cerveau, vite!

Comment dire cela à mes filles, à ma mère âgée et fragile, ayant déjà vécu cela avec mon père .Je décide d'amener cela par étape, mais de ne rien cacher au final. Cela se fait dans un face à face, tendu ou j'essaye de ne pas craquer.

Je suis terrorisé à l'idée de la semaine qui s'annonce, tout s'enchaine très vite, trop vite, ce qui renforce la sensation d'urgence, de gravité. Je suis accompagné par ma compagne dans tous les examens, elle fait front, essaye de cacher son angoisse, je la remercie de ces moments, car sans elle je crois que l'obstacle aurait été plus difficile à franchir; sa présence m'apaise, un peu. Très important de ne pas être seul, car le cerveau est en mode blocage, on ne mémorise rien, les questions? Elles ne viennent pas; l'accompagnant peut compenser cela, j'ai de plus la chance qu'elle est infirmière donc pose des questions pertinentes malgré son émotion.

La scintigraphie. On vous injecte un produit qui va se fixer sur les os et permet de visualiser les points touchés. Quelques heures d'attente entre l'injection et le passage dans la machine. Puis nouvelle attente pour les résultats, la boule au ventre. C'est parti pour les mauvaises nouvelles! LA hanche, l'épaule, le cou et d'autres points moins évidents présentent des métastases. Nouvelle claque au moral!

La ponction de la prostate. Hospitalisé pour la journée, une nouvelle expérience pour moi.  Après avoir revêtu une tenue très sexy pour la circonstance, Je vois arriver un jeune infirmier qui me pose les questions d'usage avant de me brancher la perfusion. Cela me fait bizarre, je ne peux m'empêcher de lui dire. Il y a quelques mois de cela j'encadrai les élèves infirmiers lors de leurs stages, aujourd'hui je suis de l'autre côté de la barrière, Il est très appliqué dans ses gestes, je dois lui avoir mis la pression sans le vouloir.

Arrivée au bloc, ma première anesthésie, j'essaye de me préparer mentalement, penser à quelque chose d'agréable; je suis motard, alors je vais imaginer que j'enfourche ma machine et roule dans un paysage de montagne sur une route pleine de lacets ... Monsieur, monsieur réveillez vous, j'ouvre un œil, le soleil brille à l'extérieur, ah, je suis dans la salle de réveil... Je n'ai pas eu le temps d'enfourcher ma moto !!!

Le scanner. Dernière étape de cette semaine surréaliste. Je retrouve le radiologue, celui de l'échographie. Une perf ( mes veines ne se sont jamais autant fait percées),  et hop dans la machine, le grand cercle devant moi me fait penser à la porte des étoiles (pour ceux qui connaissent le film ou la série) photographié sous tous les angles, retour à la salle d'attente. Ce cher radiologue me reçoit, résultat, il y en a par tout, des métastases ....les os, le foie, la chaine ganglionnaire ..STOP !!!  Il me serre la main, n'osant pas croiser mon regard, la mine triste en me souhaitant bon courage. Si je m'écoute à ce moment-là, je vais de suite me jeter dans la Garonne!

Retour à la maison, je m'effondre à nouveau, incapable de parler, des larmes, encore des larmes  ... Il faut que je me ressaisisse d'autant plus que ma fille ainée, prévenue par ma compagne,  déboule à la  maison, bouleversée. Nous pleurons ensemble, encore et encore.