IF, un traitement de cheval

Mais qui est donc cet arbre solitaire des bois et des taillis ombreux? l'If, je l'ai côtoyé parfois, sans savoir qui il était réellement.  L'if , dont le nom scientifique est Taxus baccata, est un arbre ornemental très commun dans les parcs et les jardins publics. Il a une croissance extrêmement lente. En raison de sa longévité, il a souvent précédé les églises et les cimetières auxquels il est souvent associé. C'est le seul conifère sans résine et sans cônes. Il peut atteindre 25 m et vivre plus de 2500 ans.

Pourquoi parler de cet arbre ? Taxus baccata, cela ne vous dit rien? Taxus, taxotère, Ce médicament TAXOTERE dont la dénomination commune est docétaxel. Le docétaxel est une substance extraite des aiguilles d’if. Ces aiguilles contiennent une molécule utilisée pour la lutte contre le cancer . Cet arbre, reste au naturel, un arbre très toxique. Après transformation, la molécule qu'on appelle le docetaxel se retrouve diluée dans les poches de chimiothérapie qui nous seront administrées.

Mais revenons à l'arbre. Ces noirceurs affirmées révèlent aussi d'autres connotations, plus subtiles. Les druides considéraient l'if comme un arbre sacré symbolisant l'immortalité,  ils portaient des couronnes d'If pour signifier l'immortalité, laquelle n'existe que par opposition à la mort. Par sa longévité qui se compte en millénaires, l'If défie la mort, il la nie. C’était l’un des cinq arbres magiques de l’ancienne Irlande.

Il ne faut pas perdre de vue que cette plante est très toxique, et son ingestion peut être mortelle. La toxicité des feuilles d’if est connue depuis l’Antiquité. Les Grecs anciens pensaient que dormir sous un if était mortel. Nos ancêtres les Gaulois connaissaient bien les propriétés de cet arbuste et l'utilisaient pour empoisonner les pointes de flèches. Jules César citait le cas de chefs gaulois s’étant suicidés à l’aide de poison extrait des feuilles.

Le feuillage est mortel pour l'homme, mais également pour le bétail ou les chevaux. L'if contient de nombreux alcaloïdes de la famille des taxanes, dont la taxine (ou taxol) qui est le composant le plus dangereux. Ce sont les feuilles qui sont les plus toxiques en cas d'ingestion. Les chevaux peuvent consommer des branches élaguées ou le feuillage si l'herbe est trop rare, mais 250 g de cette plante suffisent pour tuer un cheval. Il n'existe malheureusement aucun traitement. L'animal a des pertes d'équilibre puis des convulsions. La mort survient par arrêt cardiaque et troubles respiratoires.

Arbre séculaire, symboles d’éternité, l' if constitue un patrimoine végétal et historique d’une remarquable diversité .Connut pour être un poison puissant et violent tant pour l’homme que les animaux, l' if possèdent également des vertus médicinales notamment anticancéreuses

La récolte de jeunes pousses d’if démarre en juillet un peu partout dans le pays et se clôture vers la fin août.  Les aiguilles de l' if contiennent de la baccatine, une substance  largement utilisée dans le traitement de divers cancers depuis les années 80. Une haie de 50 mètres de long et de 1,5 mètre de haut  fournit assez de matière première pour traiter un patient.

Mais comment cela fonctionne-t-il ? Chaque cellule de votre organisme renferme une structure portante, une sorte de  squelette . Si ce  squelette  change ou est endommagé, la cellule ne peut plus croître ni se reproduire. Le taxotère fait durcir de façon artificielle le  squelette  des cellules, ce qui empêche leur croissance et la reproduction des cellules cancéreuses.

Fort de ces renseignements, il est compréhensible que l'injection de ce produit ne soit pas sans conséquence, des dégâts collatéraux en somme. À court terme, le poison qui nous est injecté va participer à la destruction des cellules cancéreuses, mais cela reste du poison, alors il est possible de penser qu'il va avoir d'autres effets à long terme.

Sur l'instant, les effets indésirables les plus couramment observés sont les suivants: neutropénie (faibles taux de neutrophiles), anémie (faible numération de globules rouges), thrombocytopénie (faible numération de plaquettes sanguines), neutropénie fébrile (neutropénie accompagnée de fièvre), neuropathie sensorielle périphérique (lésions des nerfs au niveau des mains et des pieds), neuropathie périphérique motrice (atteinte des nerfs causant des difficultés dans la coordination des mouvements), dysgueusie (altérations du goût), dyspnée (difficulté à respirer), stomatite (inflammation de la muqueuse buccale), diarrhée, nausées (sensation de malaise), vomissements, alopécie (perte des cheveux), réactions cutanées, problèmes d'ongles, myalgie (douleur musculaire), perte d'appétit, infections, rétention des liquides, asthénie (faiblesse), douleur et hypersensibilité (réactions allergiques)

La liste est longue et il est impossible d'y échapper. Il m'arrive souvent de penser que je résiste bien au traitement, mais en fait, les effets cités ci-dessus, je les ai tous ! D'une intensité variable certes, mais ils sont tous là. Ils s'estompent au fil des semaines qui suivent la chimio, mais le corps en garde des stigmates.

Dès le départ, un des éléments de stress pour moi, a été la difficulté à communiquer de manière claire et transparente avec les membres du corps médical. Leur faire comprendre que ce n'est pas parce que j'ai un cancer, que je suis incapable de réfléchir, à partir du moment où ils m'est expliqué clairement les enjeux. J'ai besoin de savoir, de comprendre.

 La vraie difficulté est de sortir d'un rapport où l'on est infantilisé ou réduit à un numéro de dossier, pour être accepté comme un individu, et véritable partenaire des soignants. Ils ont la connaissance scientifique de leur côté, nous, on a la connaissance de notre parcours de vie, de notre personnalité, de nos besoins, de nos limites. l'un et l'autre sont essentiels et complémentaires.

Je ne demande pas que l'on me raconte l'histoire de l'if, ma curiosité naturelle me permet de trouver moi même les réponses, mais, lorsque le patient le demande, que l'on soit plus précis au niveau des effets par exemple. Il est désagréable de découvrir au fur et à mesure la dangerosité de ce qui nous est injecté, désagréable de se dire, ce produit va prolonger ta vie, mais à long terme va surement te la reprendre. Désagréable d'entendre "il y a des fois où vous ne pourrez pas vous lever. Ces jours-là, restez couché, fermez les volets...ça va passer..." sans aucune autre forme d'explication.


Certes, il vaut mieux faire son expérience que de vivre celle des autres. .. mais celle-ci est  la mienne, je la partage au cas où certains se promèneraient sur la toile à la recherche des précisions que le corps médical ne donne pas spontanément.

Pour finir, je vais m'adresser à l'if sujet principal de cet article. Continu de croitre dans nos forets de France . Par tes racines, tu es relié au pouvoir de la terre, et par tes feuilles et tes branches aux forces du cosmos. Le tronc que tu possèdes, c' est comme un pont vivant entre les forces  du haut et la terre . Tu  représentes la nature qui donne et reçoit. Ami de l' homme, pour ce que tu lui donnes chaque fois qu'il a besoin. Je souhaite te remercier, car aujourd'hui, tu es celui qui prolonge ma vie,  “l’arbre des commencements”  comme tu es nommé dans l'ancienne Irlande.