l'humanité est touchée par ce fléau que l'on nomme cancer. Ce mot qui fait peur, mot qui tant que l'on est pas touché, nous essayons de laisser loin de nos pensées. Pourquoi ce nom, Antidote, parce qu'aujourd'hui, je fais partie, de ces hommes et de ces femmes qui réalisent tout ce que cela implique, ce bouleversement majeur de sa vie. Sa vie ... elle ne tient qu'à un fil, l'espoir que la science à les outils qui vont te sauver. Alors Antidote pour essayer pour partager, échanger, se renseigner, exorciser sa peur , espérer... l'écriture pour aider.

25 févr. 2017

Cancer, vivre la lumière de l'espoir plutôt que l'ombre du doute




Il est l'heure ... ma compagne me réveille en douceur, il est six heures.  Je me lève en silence et me mets en route vers mon destin.

La nuit recouvre encore le paysage, la route est nimbée de brouillard alors que nous roulons vers Bordeaux nord. L'autoroute est déjà encombrée par ceux qui se rendent au travail. Drôle de vie que l'homme s'est créé!

Nous ne discutons de tout, de rien, comme si tout était normal. A l'approche de la clinique, notre préoccupation est de trouver une place hors du parking officiel qui est payant. Une journée entière, cela va faire mal au portefeuille! Nous trouvons une place sur le parking de la cité qui jouxte la clinique.

Nous sommes un peu en avance. Je me dirige vers le secrétariat, voilà, c'est là que tout commence! tiens, voilà Lénine qui embauche ... va-t-il me prendre en charge comme la dernière fois?
Une voix fluette prononce mon nom. Une petite infirmière me convie à entrer dans la salle du scanner. C'est une étudiante, et elle à la tache de me préparer. Ce scanner est flambant neuf, d'ailleurs la table sur laquelle je m'installe est beaucoup plus confortable .. Ou alors c'est moi qui m'habitue! 

C'est le moment de bravoure, l'étudiante se met en quête de la veine! j'essaye de la guider vers le meilleur lieu ou piquer. Elle est en difficulté et préfère passer la main. Un grand gaillard, blond, queue de cheval, type viking, pénètre dans la salle. D'une main experte commence à me malaxer le bras .... enfin pas si experte que ça la main! l'aiguille tourne et vire dans mon avant bras et ... Raté!

En route pour le deuxième essai. Tourne, vire ... un délice! Je commence à avoir des bouffées de chaleur. Enfin il a trouvé la voie! Je me détends. Il m'explique la manœuvre. Merci, je suis déjà un expert!

Les images de stargate  inondent mon esprit alors que la machine ronronne ... en route pour la porte des étoiles ... C'est terminé. Le cathéter n'est pas ôté pour éviter que l'on me repique pour la scintigraphie. Merci!

Je n'attends pas les résultats, car je suis attendu au rayon scintigraphie. Encombré de ma tubulure, de mes vêtements, car je ne peux me rhabiller, nous voilà en route vers la suite.

 Il faut traverser tout l'hôpital, car la salle est à l'autre extrémité du bâtiment. J'ai l'impression d'être dans les reines du shopping, à courir vers l'autre magasin! 

Formalités d'usage puis direction la salle d'attente, au fond du couloir. Quinze personnes sont réunies dans cette petite salle sordide. Je déteste cette pièce! Un silence de mort y règne, les murs sont dégradés, l'unique fenêtre donne sur un arbre dans lequel je me réfugie ... comme la fois précédente.

Une heure d'attente. Sont réunis des gens avec leur perf branchée, ceux qui comme moi attendent leur injection, d'autres les résultats, un qui tousse comme un damné ... envie de fuir!

Heureusement il y a mon arbre. La nature m' enveloppe, elle m'étreint;  me  soutient , me sourit  ... enfin mon tour!

Deux infirmières m'accueillent, engoncées dans leur tablier de plomb. La plus jeune est une étudiante. Elle est déçue de ne va pas pouvoir me piquer vu que je suis déjà appareillé. Elle ne sait pas ce qu'elle manque! mais moi si. Elle procède à l'injection du produit radioactif. Elle manie maladroitement la seringue qui est entourée de sa protection de plomb, donc plus lourde qu'à l'habitude. Me voilà radioactif et prêt pour trois heures d'attente, le temps que le produit se fixe sur mon squelette.

Vous venez de vivre la première partie comme si vous y étiez.. Il faut meubler trois heures. Nous quittons la clinique. Mais voilà, bordeaux nord, est un lieu composé de barres d'immeubles disgracieux ou vivent entassés dans ces clapiers les exclus de la ville. Ou trouver un lieu pour boire un café, manger un morceau?

Interlude. Nous arpentons la cité. Nous finissons par dégoter un lieu avec des commerces. Nous trouvons une sorte de café. Nous nous installons sous le regard des autres clients. Pas un mot de français n'est échangé en ce lieu, c'est dépaysant. Cela ne me dérange pas, mais me ramène à penser aux problèmes de société actuels, ou tout le monde se méfie de l'étranger. Aujourd'hui, c'est moi l'étranger! Nous quittons le lieu sous des regards qui semblent dire qu'est ce que vous foutez ici! Qu'il est dommage d'en arriver à cela dans notre beau pays! nous sommes tous sur le même bateau quelle que soit notre couleur, notre religion, nos opinions! Cela laisse quand même un malaise ... dommage

Fin de l'interlude. Nous retournons à la clinique récupérer les résultats de scanner. Je m'installe dans un couloir pour prendre connaissance des résultats. Je suis serein, car préparé aux mauvaises nouvelles, il n'en est pas de même de ma compagne.

Le verdict est tombé. Mon colocataire reprend du service. Le foie est touché par une nouvelle métastase de 30mm de diamètre, dans le segment cinq. Cela s'ajoute aux autres lésions qui elles, restent stables. Je n'ai pas d'émotion particulière à la lecture de ce rapport, je m'y attendais.

Retour en salle d'attente de scintigraphie. Un heure trente  plus tard, je suis invité à m'installer sur la table. Nouveau voyage interstellaire. Une nouvelle heure d'attente avant d'être convié dans le bureau de médecin pour la lecture du bilan.

C'est toujours sans émotion particulière que je m'installe dans le bureau. Verdict: globale stabilité de l'aspect scintigraphique, avec même une discrète diminution en intensité de certains foyers. Après la mauvaise nouvelle, en voici une bien meilleure!

Une petite heure d'attente avant de récupérer mon dossier. Le marathon n'est pas terminé, je file voir mon ange gardien. Il est quinze heures trente, mon rendez-vous est fixé dans une heure. Je présente mon cas à la secrétaire qui me dit de m'installer ... dans la salle d'attente bien sûr!

Nous sommes seuls ce qui nous laisse l'espoir de ne pas trop patienter. Effectivement, moins de cinq minutes se sont écoulées et nous sommes conviés à entrer.

Lecture des résultats dans un silence monacal. Tien! une ride soucieuse sur le front de mon ange gardien. Il s'agite sur son siège, marmonne quelques mots. Je perçois, enfin, chez lui un intense combat mental ... " Vous vous sentez comment? Très bien, bien?"

"Pas si mal que ça" lui dit je. "Je vous propose quelques séances de taxotère, trois, quatre, je ne sais pas. Vous sentez-vous d'attaque?"

La vie est parfois étrange, avec son lot de surprises et d'imprévus. Impossible de connaître à l'avance combien d'étapes nous allons franchir, combien d'obstacles devrons nous surmonter?  Il faut juste avoir la ténacité et le courage de le faire. "Je choisis de vivre dans la lumière de mes espoirs plutôt que dans l'ombre de mes doutes, alors on y va"

Rendez-vous est pris pour vendredi. Trois mois de chimio puis série d'examens, ensuite il avisera.
Nous sommes sur le parking. Sentir le vent, fermer les yeux, et respirer jusqu’à l’ivresse, c'est tout ce qui m'importe pour l'instant. Fin d'une journée bien ordinaire quand le cancer vous étreint.

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