l'humanité est touchée par ce fléau que l'on nomme cancer. Ce mot qui fait peur, mot qui tant que l'on est pas touché, nous essayons de laisser loin de nos pensées. Pourquoi ce nom, Antidote, parce qu'aujourd'hui, je fais partie, de ces hommes et de ces femmes qui réalisent tout ce que cela implique, ce bouleversement majeur de sa vie. Sa vie ... elle ne tient qu'à un fil, l'espoir que la science à les outils qui vont te sauver. Alors Antidote pour essayer pour partager, échanger, se renseigner, exorciser sa peur , espérer... l'écriture pour aider.

21 mars 2018

Same player shoot again



Adolescent, il y avait un jeu que j’appréciais particulièrement, le flipper. Mettre une pièce de 50 centimes dans la machine. Trois balles disponibles avant le « game over » fatidique, sauf si l’on obtenait l" extra ball », encore et encore pour prolonger la partie indéfiniment.

Aujourd’hui, il me reste une balle. Le « same player shoot again » est de plus en plus difficile à obtenir. Le vent a tourné, la partie est rude, mais je m’accroche encore, la balle virevolte, m’échappe, je la rattrape, elle s’échappe à nouveau... je fatigue.

Une fois de plus, le liquide bleu s’écoule dans mes veines. L’oncologue a décidé de procéder à la chimio, car l’augmentation des PSA est minime. Il a suivi l’avis de ma généraliste, et a programmé une scintigraphie... pour demain.

Mardi matin, 7 h 30, je suis sur la route. La journée va être longue, très longue, mais ça, je ne le sais pas encore.

Le stagiaire trépigne à l’idée de pouvoir me percer les veines. Je commence par le descriptif de la situation. Circuit veineux HS ! L’infirmière préfère prendre les choses en main, je suis soulagé, et l’en remercie. Dommage pour le stagiaire, mais je commence à refuser l’obstacle, marre de souffrir.

Le premier essai est un fiasco. Le deuxième finit par aboutir. Le liquide radioactif se mélange à mon sang bleu. Je dois revenir à midi et quart pour la suite des opérations.

Ma compagne et moi-même tentons une sortie en ville, histoire de faire passer le temps. Le froid intense qui règne va nous obliger à un repli stratégique dans la clinique, plus tôt que prévu. L’attente est longue.

Retour au service de médecine nucléaire. Nouvelle attente avant que je ne sois enfin convié à m’étendre dans la machine. Vingt minutes sans bouger le moindre muscle. J’ai froid.

Retour en salle d’attente avant interprétation des clichés. Et voilà l’imprévu ! on me signale que je dois repasser dans la machine dans vingt minutes pour des clichés complémentaires. Je vais donc attendre docilement, me disant que certains clichés ne sont pas forcément nets, vu que j’ai un peu bougé à cause du froid.

Je suis de nouveau installé sur la table et... sanglé. Voilà, bien fait pour toi, fallait pas bouger ! Mais je vais vite comprendre que ce n’est pas le problème.

Le comportement de la machine est différent. Au lieu de me scanner à plat, elle tourne autour de mon bassin. Un joli 360, avant de remonter pour procéder à la même manœuvre autour de mon crâne. Je suis libéré au bout d’un bon quart d’heure, direction la salle d’attente, sans aucune explication.

C’est à quinze heures que je suis reçu par un médecin à la mine sombre. Je ne suis pas étonné de sa gravité, vu que cela fait de longues minutes que mon esprit étudie plusieurs scénarios. Après quelques raclements de gorge, il se lance.

« Vous ressentez des douleurs au niveau osseux ? ». Je lui décris donc mes problèmes et mes céphalées.

« Vos lésions osseuses progressent, particulièrement au niveau de l’aile iliaque droite, ainsi que l’apparition d’un point sur l’os occipital gauche », « Le maxillaire supérieur droit et gauche sont aussi touchés »

cela ne fait que confirmer mes craintes. Je dois maintenant rejoindre mon ange gardien afin de voir s’il a dans sa besace une « extra ball » me permettant de continuer mon voyage.

« Je n’ai pas grand-chose à vous proposer. Quelques séances de radiothérapie éventuellement, cela peux fixer vos lésions. » J’accepte, car, que faire d’autre.

 Il se met une fois de plus sur la défensive quand je lui demande si cela va résoudre mon problème de céphalées. 

« Je ne sais pas, je vous propose cela pour vous rendre service, mais il faut vous dire qu’après cela, il y aura autre chose ! »

Mon décodeur me renvoie ceci : je ne peux plus te soigner, je te rends simplement service, car il n’y a plus rien à faire, les choses vont continuer à empirer. Vous remarquerez bien que nous sommes dans le service à la personne, plus dans le soin. J’adore sa façon de me remonter le moral !  

Je pense qu’il va être nécessaire de mettre un terme à notre relation. Nous sommes de moins en moins sur la même longueur d’onde, les incompréhensions se multiplient, il n’a plus rien de motivant à me proposer, je suis dépité...

Je quitte bordeaux nord pour rencontrer ma généraliste. (Eh oui, le marathon n’est pas terminé !). Je suis reçu entre deux patients, vu que je n’ai pas de rendez-vous. Elle prend connaissance des résultats. Cela la conforte dans son diagnostic. Elle ajuste mon traitement antalgique à la situation.

Vendredi matin, scanner de centrage avant cinq séances de radiothérapie. Cela veut dire des heures à passer sur la route, de la fatigue, pour un résultat aléatoire.

Ce matin, le lever est difficile. Je suis extrêmement fatigué. Le moral n’est pas au beau fixe. Je sais, je dois être courageux, garder le moral, me battre....  Après tout, je suis encore en vie, comme à su me le dire une connaissance, rajoutant qu’il me faut juste bien manger et dormir, et que tout va s’arranger ! Vous vous doutez bien que cette personne est classée dans ma case « toxique, à éviter »

J’avoue ressentir parfois de l’animosité devant certaines réflexions. Le bien portant ne se rend pas toujours compte de la portée de ses mots, mais je n’ai plus envie de batailler avec cela, cela m’attriste simplement.

Bon, laissons la bêtise de côté. Je vais remettre mon armure et reprendre ma route, essayant de traverser au mieux cette nouvelle épreuve, à la recherche de « l’extra ball » qui va m’éviter le « game over ».

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