Les jours défilent, rythmés par les aller-retour vers
Bordeaux nord, et les milles et un ennuis qui dévorent mon énergie. Ballotté de
la radiothérapie à l’oncologue, en passant par ma généraliste, j’essaye de
trouver quelques instants de bien-être dans ce chaos.
Le scanner de centrage a bien eu lieu vendredi. J’ai
découvert les joies de porter un masque thermoformé sur mon visage, afin de
procéder à l’irradiation de l’occipital. Ce masque vous scotche à la table.
Impossible de bouger, de parler, tout juste respirer. Moments très
inconfortables !
Il est utilisé pour poser les points d’irradiation. Cela
évite de tatouer le crâne. L’idée est louable, mais, bon Dieu que c’est
difficile de supporter cela durant un quart d’heure. J’ai l’impression que Spiderman
m’a balancé sa toile sur le visage !
Et puis il y a eu les soucis de la semaine. Augmentation des
nausées. Impossible de se nourrir correctement. Bilan, moins trois kilos en
quelques jours. L’apothéose a commencé ce lundi.
Pour la première fois en 29
mois de traitement, chaque soir vers dix-sept heures, je cours me prosterner
sur la cuvette des toilettes, sous le regard interloqué des chiens, qui ne
comprennent pas ces incantations à la tonalité gutturale que je profère,
mélangées de pleurs, qui me secouent de la tête au pied, me laissant sans
énergie.
Pourquoi le soir ? Parce que j’accumule tout ce que j’avale durant
la journée et ne digère plus. Donc, en soirée, il y a le trop-plein à évacuer.
Les corticoïdes prescrits par ma généraliste ont atténué le problème. Moins de
nausées, et je ne me prosterne plus ! Mais le ventre double de volume et le soir
le repas est quasi inexistant.
Au petit matin, tout est rentré dans l’ordre,
puis le cycle recommence.
À la palpation, le médecin découvre que la masse hépatique
fait pression sur l’estomac, d’où mes soucis de reflux, nausées, etc. Rien de
réjouissant, car cela ne peut qu’empirer.
Et comme cela n’est pas suffisant, lors de la première
séance de radiothérapie, les mille et un ennuis ont continué !
Dans la journée, je ressens une douleur au niveau du
maxillaire, plutôt de l’articulation de la mâchoire. Je n’y prête pas vraiment
attention, mettant cela sur le compte du masque qui m’écrase le visage. Nouvelle
séance jeudi. Petite sieste en début d’après-midi et... au réveil, douleur
intense, sensation de gonflement au niveau du visage.
Miroir, miroir suis le plus beau ? C’est sans appel, l’image
qui m’est renvoyée montre un visage en forme de poire, j’ai les boules au sens
propre ! Panique à bord.
Je contacte
immédiatement la radiothérapie, qui ne comprend pas, car les rayons ne touchent
pas cette zone. Ils me passent l’oncologue. Diagnostic rapide : « ce n’est
pas la radiothérapie, prenez un anti-inflammatoire ou consultez votre médecin ».
Merci pour votre aide précieuse monsieur l’oncologue !
Appel chez ma généraliste, qui immédiatement me demande si
je peux venir. Aucun problème, je cours, je vole !
Parotidite, autrement dit gonflement des glandes salivaires.
Elle est étonnée, c’est la première fois qu’elle observe un gonflement bilatéral,
car c’est plutôt rare. Prescription, une nouvelle fois de corticoïdes. Mais
elle essaye de joindre l’onco pour être sur de la dose, que cela ne pose pas de
problème avec mes autres traitements. Peine perdue, il est injoignable. Elle
laisse un message, dès qu’elle a sa réponse, elle me recontacte. Elle établit
tout de même sa prescription, je dois commencer avec 20 mg.
Nouvelle séance de radiothérapie le lendemain. Les glandes
sont rentrées dans leur logement durant la nuit. Le personnel est au petit soin
avec moi, ont-ils un doute ? Moi oui ! car une des radiologues n’est pas au top
et se fait reprendre régulièrement par la plus ancienne. D’ailleurs aujourd’hui,
elle a voulu irradier la hanche gauche, au lieu de la droite !
En début d’après-midi, ma généraliste me recontacte, en
colère, car elle n’a pas de nouvelles de l’onco. C’est vers 16 h qu’il
daigne la rappeler. La dose de corticoïde passe de 20 mg à 80 mg !
soit au-dessus le dose max préconisé. Elle trouve cela exagéré et me demande de
passer à 60 et de baisser de 20 mg dans quatre jours. C’est la guerre des
chefs !
Je dois rencontrer le maître (c’est ironique !) mardi après
ma séance de radiothérapie. Quelque chose me dit que cela va être chaud, tant
nos différents commencent à prendre le dessus. La cool attitude que je cultive
va peut-être laisser place à mon côté obscur !
Au-delà de tout cela, la douleur physique n’est rien par
rapport à la peur des lendemains. Toute tentative de bonheur est illusoire.
Avancer la tète haute pour traverser les orages et vivre en noir et blanc au
grés des événements c’est tout ce que j’arrive à faire.
À vrai dire, il y a quand même des instants fugaces de
bonheur. La rencontre de Samuel, ce chauffeur de taxi qui par sa bonne humeur,
son humour, a réussi a me faire rire et raccourcir les temps de trajet, merci à
toi.
Cette visite de mes amis pyrénéens, que je crains toujours
de ne pas revoir...
Cette sortie à Arcachon, dimanche. Trois semaines que je ne
mets pas le nez dehors, autrement que pour me plonger dans la maladie. Un bol d’air
salutaire, qui me permet aujourd’hui d’avoir envie de consigner mes petits
tracas de ces dernières semaines, et me redonne l’envie de bouger.
L’envie de refaire mon fourgon, « carpe diem », qui à cause
d’une loi imbécile n’aura plus le droit de rouler avec sa carte grise actuelle
de camionnette vu qu’il est équipé camping-car. Mais ça, c’est une autre
histoire ! J’espère simplement avoir encore la force, car elle n’est plus
toujours avec moi.
Je n’aime pas que l’on touche au peu de liberté qu’il me
reste ! À bien y réfléchir, cela devrait être suffisant pour me motiver et me
donner l’énergie.
Il me reste deux séances de radiothérapie, puis je vais
renouer avec la chimio. Pas trop le temps de se poser. Portez-vous bien, je
vais continuer le combat, accompagné de mes proches, mes amis et de votre
soutien. Et surtout de ma compagne, car il y a son regard, sa main dans mes
cheveux, qui me retiennent, apaisent ma solitude. Je veux vieillir avec elle,
défier le temps en sa compagnie, voir ce temps strier nos visages de rides.
Tomber, me relever,
cent fois, rien que pour toi.....
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